Il faisait froid et la neige était épaisse cette année là. Tobias joignit les mains et souffla à l'intérieur dans l'espoir de se réchauffer. Le jeune homme coupait du bois depuis plusieurs heures déjà. Épuisé et frigorifié, il décida de rassembler le fruit de son travail, le hissa sur son dos et se mit en route. Le village se trouvait à plus d'une demi heure de marche et pourtant, le jeune homme espérait que ce voyage ne se termine jamais. Lorsqu'il arriva enfin en vue du hameaux qui l'avait vu grandir, ses yeux s'embuèrent de larmes. Cela faisait désormais plusieurs années que lui et son frère avaient été séparés de leurs parents lors de la terrible guerre qui secoua la région. Mais le pire, c'était que son petit frère fut enlevé peu de temps après. Il n'était alors qu'un enfant et Tobias, qui venait d'atteindre sa majorité, n'avait pas pu le protéger. En cette période de trouble, les rapts d'enfant étaient monnaie courante.
Il regagna sa maison et
s'arrêta un instant devant elle. Elle était en bien piteux état.
La demeure qui avait été l'une des plus belles du village était
désormais une simple ruine dont l'état empirait de plus en plus
rapidement. Tobias entra, alluma un grand feu dans la cheminée et
s’assit sur le grand canapé, dernier vestige de l'impressionnante
richesse de la famille. Le jeune homme regarda les flemmes danser.
Combien de temps ? Même lui n'aurait su le dire. Il se perdit
tout simplement dans ses pensées. Lorsque Tobias revint à lui,
l'idée de retrouver son frère était devenu une évidence. Était
il mort ? Il n'en savait rien. Mais le jeune homme ne voulait
plus passer un seul Noël seul. A vrai dire il ne voulait plus passer
un seul jour seul. Il était pauvre et survivait en se débrouillant.
Le village le respectait, mais son orgueil lui interdisait d'accepter
l'aide de son voisinage et à travers ces années de labeurs il avait
gagné en force et en maturité. Il était temps pour lui de partir.
Le jeune homme monta le
grand escalier en bois massif qui faisait jadis le faste de la
demeure. Les marches grincèrent sous ses pas. Tobias regagna la
chambre intacte de son frère, et resta planté là quelques minutes.
Dans le plus grand silence il se promit de le retrouver. Il fit de
même dans la chambre parentale, comme pour en garder un dernier
souvenir. Le jeune homme gagna enfin sa chambre et commença à
rassembler ses affaires. Il n'emmènerait que le stricte minimum. Un
couteau et deux trois effets personnels, un peu de nourriture et le
peu d'argent qu'il avait ; il ne lui en fallait pas plus pour
survivre. Avec le temps il avait appris à se débrouiller. Lorsque
tout fut près, Tobias mangea un bout de pain assis en tailleur sur
son lit, les larmes aux yeux. Pour lui, il était difficile de
quitter son ancienne vie, ou plutôt ce qui faisait son ancienne vie
car hormis la maison délabrée, son ancienne vie remontait à très
loin maintenant.
Lorsque le jeune homme
eu finit de manger, il emmitoufla dans sa couverture et redescendit
se poser devant la cheminée. Les nuits étaient de plus en plus
froides et c'était désormais le dernier endroit où l'on pouvait
encore avoir chaud. Dans le silence de la nuit, le jeune homme finit
par s'assoupir.
Il gravissait la colline
enneigée les yeux baignés de larmes. Il marchait face au vent, face
au soleil levant. Qu'avait il fait, mais qu'avait il fait se répétait
il dans sa tête. Lorsqu'enfin Tobias arriva au sommet de la colline
il se retourna et contempla avec émerveillement la somptueuse plaine
blanche qu'il avait laissé derrière lui. De là où il était, il
pouvait apercevoir son ancienne demeure succomber sous les flammes.
Le jeune homme y avait mis le feux peut avant le lever du soleil et
s'était enfuis juste après. Il savait que les habitants allaient
très rapidement essayer d'éteindre les flammes et son orgueil ne
voulait pas que quelqu'un le repère dans sa fuite. En effet, Tobias
ne voulait rien laisser de son ancienne vie, de sa misère, et les
temps heureux qu'il avait vécu, eux, vivraient éternellement dans
son cœur. Le jeune homme préférait donc être pris pour mort que
pour un fugitif. Après cette dernière contemplation, il tourna les
talon, et partit pour l'inconnu.
Par Thomas.
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