lundi 15 juillet 2013

Ambitions Médiévales Part. 2


     La fête battait son plein. Jehan se dirigea vers son père et sa nouvelle épouse,
Margault, qui recevaient les félicitations des invités.
  - Mes voeux de bonheur aux mariés, fit le bâtard au couple.
  - Te voilà Jehan, s’exclama de duc d’une voix chaleureuse tandis que son sourire accentuait
les rides autour de sa bouche et de ses yeux. Margault, n’ayez pas peur de lui ! Approchez, il
ne va pas vous mordre.
Les joues de la jeune mariée s’empourprèrent tandis qu’elle avançait timidement vers lui.
Jehan fit une courbette et loua sa beauté sous le regard amusé de son père. Margault était très
en beauté ce soir-là et, plus que jamais, la différence d’âge entre les époux était flagrante. A
côté de sa jolie jeune femme, le duc Adrien faisait peine à voir avec ses cheveux gris et son
pied légèrement boiteux. Jehan remarqua le regard intéressé de sa nouvelle belle-mère qui
aurait certainement souhaité que son nouvel époux soit aussi beau et jeune qu’il l’était, mais
sans doute apprendrait-elle à aimer son mari ou, faute de mieux, à le supporter. Il lui envoya
un nouveau sourire et elle baissa les yeux en rougissant.
  - Et où donc se trouve-t-on frère ? Demanda Adrien en contemplant la grande salle à la
recherche de son fils légitime.
Le fils bâtard haussa les épaules.
  - Il rumine certainement dans son coin.
  - Et bien il se fera une raison, répliqua le duc qui connaissait l’avis de Gaultier sur ce
mariage.
  - Certainement.
Adrien secoua la tête en soupirant.
  - Toi au moins tu ne m’as jamais causé de problème, fit-il. Si j’avais su, j’aurai fait
uniquement des bâtards !
Le vieil homme partit alors en un rire gras sous les yeux écarquillés de sa jeune épouse et sous
le regard amusé de Jehan.
  - Je vous remercie père, répondit-il à Adrien.
Puis en se tournant vers Margault :
  - Vous et moi nous entendrons à merveille, ma Dame.
Les joues de la jeune fille s’empourprèrent une nouvelle fois et elle inclina légèrement la tête.
  - Naturellement, répliqua-t-elle timidement.
Les invités finirent par s’attabler autour du banquet dans une joyeuse cacophonie et Jehan prit
place au côté de son meilleur compagnon, Arold, fils d’un seigneur voisin et qui servait au
château comme écuyer. Il remarqua en face de lui la mine sombre de Gaultier auprès de sa
très fade épouse, Clothilde, et lui fit un signe de tête auquel son frère répondit poliment.
  - Jour heureux, n’est-ce point ? Demanda Arold.
  - Plutôt heureux, je l’accorde.
  - Cela ne donne-t-il pas envie de prendre épouse ?
  - Grand dieu, non ! Un bâtard n’a nul besoin de se marier ni de faire des enfants. Non, il est
bien plus agréable de conserver une vie de célibataire. Butiner un bon nombre de fleurs sans
se faire sermonner au retour dans la ruche, voilà qui me convient parfaitement.
Il contempla avec avidité la jeune servante aux formes généreuses qui faisait office
d’échanson et passa une main habile sur ses hanches lorsqu’elle parvint à sa hauteur. La
servante ouvrit d’abord la bouche pour protester doucement, mais ses lèvres s’étirèrent
rapidement en un large sourire lorsqu’elle reconnue le bâtard aux traits délicieux. Jehan lui
rendit son sourire, se promettant de la mander pour la nuit une fois la fête achever.
  - Silence tout le monde ! S’exclama la voix rauque d’Adrien. Silence !
Les conversations cessèrent et les musiciens s’arrêtèrent. Tous les regards convergèrent vers
le marié qui s’était levé et tenait son verre d’hydromel à la main.
  - Je souhaite rendre grâce à vous tous, ainsi qu’à ma jeune et merveilleuse épouse, fit Adrien.
Puisse cette jeunette me donner nombreux marmots !
Les rires explosèrent tandis que Margault baissait la tête, rouge de honte.
  - Buvons les amis et mangeons jusqu’à s’en faire exploser la panse !
Adrien porta la coupe jusqu’à ses lèvres et bu d’un trait sous les hurlements joyeux des
convives qui l’imitèrent. Jehan et Arold demandèrent immédiatement qu’on remplisse leur
verre et seul Gaultier et Clothilde semblaient ne pas prendre de plaisir à la fête.
  - Amuse-toi mon frère, lui cria Jehan qui sentait déjà le vin lui monter à la tête.
Gaultier l’observa, les dents serrées. Puis le fils légitime d’Adrien reporta un regard attentif
vers son père qui buvait lui aussi sa troisième coupe. Plusieurs minutes s’écoulèrent alors
jusqu’à se qu’un cri de terreur plongea la salle dans le silence.
  - Monsieur mon époux ?! Hurla Margault qui se penchait sur son mari tombé à terre. Mon
mari !?
Des serviteurs se précipitèrent vers le duc et Jehan se redressa immédiatement.
  - Faite chercher un médecin ! Hurla-t-il alors que la panique envahissait la pièce.
  - Il ne respire plus, fit l’un des amis du duc qui se trouvait près d’Adrien. Il est mort…
Jehan sentit ses jambes se dérober sous lui et fut soutenu par Arold. Le bâtard détourna les
yeux et les posa sur son frère Gaultier. L’espace de quelques secondes, il put voir sur le visage
de son frère une lueur de joie, de victoire, puis le sourire s’effaça aussi vite qu’il était apparu.
Gaultier en temps que successeur de son père, devenait donc duc.

     Ils chevauchaient dans la forêt traquant le cerf qu’ils avaient débusqué plus tôt. Gaultier était
vêtu comme un roi, tout fier qu’il était d’être le nouveau duc. La mort de leur père n’avait pas,
semblait-il, avoir eu un grand effet sur lui, et le deuil avait rapidement été achevé. Jehan,
quant à lui, pensait encore régulièrement à son défunt père et éprouvait beaucoup de mal à
contenir sa haine en la présence de son frère. Il savait ce que celui-ci avait fait. Il est vrai,
beaucoup d’homme de l’âge du duc Adrien mourait suite à des faiblesses du coeur, mais
Gaultier avait beau eu nié, le bâtard était persuadé que la santé d’Adrien n’avait rien avoir
avec cette mort prématurée. Gaultier était le coupable. Son frère était un parricide et il
comptait bien le lui faire payer. Ils approchèrent le petit ravin que Jehan connaissait par coeur
pour y avoir joué tant de fois étant enfant, mais que Gaultier n’avait même jamais remarqué,
trop occupé qu’il était à joué au petit chef dans l’enceinte du château. Jehan continua sans
problème à trotter, mais son frère chuta comme il s’y attendait. Le cri de douleur que poussa
Gaultier emplit le bâtard de satisfaction et celui-ci fit demi tour pour observer son frère affalé
sur le sol.
  - On ne sait plus chevaucher ? Ricana-t-il tandis que Gaultier se tordait de douleur.
  - Tais-toi donc bâtard et aide moi !
Jehan descendit de sa monture pour le rejoindre, se régalant du spectacle qu’il avait sous les
yeux.
  - C’est toi qui as tué père ? Fit-il doucement alors qu’il parvenait tout près de lui.
Les yeux de Gaultier s’écarquillèrent et il secoua la tête en grinçant des dents sous la
douleur.
  - Dis-moi la vérité, sinon je te laisse pourrir ici.
Gaultier hésita, mais il vit dans le regard de son frère que celui-ci ne plaisantait pas.
  - Il… il était vieux, bafouilla-t-il car la douleur lui faisait perdre ses mots, sa mort n’était pas
une grande perte.
Les narines de Jehan se pincèrent tandis qu’il tentait de contrôler sa colère.
  - Et ça te donnait le droit de le tuer ?
  - Je n’aurai plus rien eu de l’héritage ! Il allait tout me prendre ! Ce que j’ai fait nous a rendu
service à tous les deux !
  - A toi peut-être, mais pas à moi.
Un silence s’abattit pendant que Jehan réfléchissait à ce qu’il devait faire. Mais la colère
l’empêchait de se concentrer. Son coeur appelait justice, ou plutôt, il hurlait vengeance.
  - Aide-moi maintenant, Dieu que je souffre !
  - Vois-tu, finit-il par dire calmement, maintenant il me faut songer à mes propres intérêts.
Il s’avança plus près de son frère qui ne mit guère longtemps à comprendre ce qu’il allait se
passer.
  - Non ! Tu ne peux pas faire ça !
  - Salut père de ma part.
  - Non !
Il attrapa la tête de Gaultier et, d’un mouvement brusque, le tua sans une once de pitié. Le
pauvre jeune duc s’était tué dans sa chute, personne ne le soupçonnerait. Jehan contempla le
corps de son frère aîné pendant quelques secondes, puis se détourna pour enfourcher sa
monture et détaler à toute vitesse. L’ambition était impitoyable, Gaultier était bien placé pour
le savoir, et c’était Jehan qui avait remporté le combat du plus fort.

Coralie Martin

3 commentaires:

  1. Ce blog manque cruellement de commentaires et d'avis! Alors, plein de compassion, j'en laisse un :) J'aime beaucoup le blog, j'apprécie grandement la nouvelle (le début en tout cas)et j'espère que vous allez continuer ainsi !

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  2. Je suis si pressé de voir la suite ,je dévore chaque mot

    vite la suite !!!

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