vendredi 19 juillet 2013

Ambitions Médiévales : part. 3


  - Il me faut prendre épouse.
Arold cracha la moitié de son verre de vin.
  - Une épouse ?! S’étrangla-t-il tandis que des gouttes de boisson parsemaient son menton.
Jehan hocha la tête.
  - A présent que je suis à la tête du fief de mon père et que nul héritier n’est vivant pour me
succéder, je crois qu’il serait sage que je trouve une femme légitime à engrosser.
  - Toi avec une épouse ? Tu avais pourtant dis…
  - Ce que j’ai dit, le coupa Jehan, ne vaut plus rien à présent. Je ne suis plus simplement le
bâtard à présent, et mon nouveau titre implique de nouvelles obligations. Le duc se doit
d’avoir un héritier.
Arold hocha la tête.
  - As-tu quelqu’un en tête ? Peut-être la veuve de ton père, elle est encore…
  - Je ne veux pas de Margault.
  - Mais c’est la…
Jehan leva les mains devant lui, obligeant Arold à garder le silence.
  - Arold, Arold, soupira-t-il. Tu me connais depuis longtemps, crois-tu vraiment que
Margault soit à la hauteur de mes ambitions. Celle que je veux, c’est Ariane.
Un court silence s’abattit.
  - La fille du Nord ! Souffla Arold qui n’en revenait pas. Mais Jehan, elle n’acceptera…
  - Je n’ai cure de ce qu’elle pense ! C’est elle que je veux, alors fait en sorte que je l’obtienne.
Une demande fut immédiatement envoyée et Jehan préparait déjà ces grands projets. Obtenir
l’amitié de ces provinces du nord par son union avec Mathilde lui apporterait nombreuses
satisfactions. D’abord, il serait plus riche et plus puissant, ensuite, il serait capable d’obtenir
un ost important et mener sa guerre privée vengeresse contre l’ennemi de son père qui avait
tant de fois mené des pillages sur ses terres lorsqu’il était encore un enfant. C’était d’ailleurs
lors de l’un de ces conflits de noblesse que sa mère avait trouvé la mort. Jehan trépignait de
joie à l’idée de tout ce qu’il pourrait entreprendre en tant que duc, ravi de constater qu’à
aucun moment on l’avait soupçonné de la mort tragique de Gaultier. Chacun avait accepté le
dernier héritier d’Adrien et se pliaient à ses moindres désirs. Jamais il n’avait imaginé pouvoir
atteindre réellement une telle position, même s’il en avait longuement rêvé la nuit depuis qu’il
avait atteint l’âge d’homme. La réponse du nord ne mit guère longtemps à venir et Jehan
explosa dans une colère noire.
  - Elle a dit quoi !?! Rugit-il lorsqu’on lui apprit la nouvelle.
  - Elle refuse d’épouser un bâtard et ne s’abaissera pas à une telle humiliation.
Jehan attrapa son verre et le jeta avec rage contre le messager qui tremblait de peur.
  - Elle me refuse ! Et son père que dit-il ?
  - Il était prêt à accepter, mais il ne souhaite pas aller à l’encontre du souhait de son unique
enfant. Ariane est assez convoitée et peut aisément faire un beau mariage.
Le jeune duc garda le silence afin de réfléchir. Le père était donc d’accord, il restait juste à
convaincre la jeune femme.
  - Cette puterelle ne s’en sortira pas comme cela ! Maugréa-t-il. Préparez-vous, nous partons
vers le nord !
Nombreux furent ceux qui tentèrent de l’éloigner de cette folie. Il pouvait aussi bien épouser
Margault, mais Jehan refusait d’écouter. C’était Ariane qu’il voulait et on ne le refusait pas si
facilement. Il lui montrerait que l’épouser n’était point une humiliation et que, au contraire,
elle gagnerait un homme fort et de grand intérêt. Ils arrivèrent dans les contrées du nord au
bout de plusieurs jours et c’est avec empressement que Jehan se rendit auprès du père
d’Ariane.
  - Jeune duc, quel plaisir de vous accueillir chez nous ?
  - Plus tard. Où est donc votre fille ?
Le comte chancela sous le regard froid du bâtard.
  - En promenade dans les jardins.
  - Vous allez autorisez notre mariage vieil homme, souffla le duc, sinon je réduis tout vos
biens en cendre.
  - Certes… Bien entendu.
  - Je suis ravie de l’entendre.
Il abandonna alors le comte pour se rendre dans les jardins où Ariane se baladait
tranquillement avec son chaperon. La jeune femme sursauta en le voyant se positionner
devant elle et le contempla avec appréhension.
  - Bonjour future épouse, fit-il d’une voix caressante. Vous êtes encore plus belle que je ne le
pensais !
Elle le toisa de haut en bas. Elle était vraiment de toute beauté ! Vêtue d’une robe attrayante,
ses cheveux brun foncés enfermés dans une crépine d’or et ses grands yeux noirs qui le
dévisageaient ; elle ne le laissait guère indifférente.
  - Qui êtes vous ?
  - Le Duc Jehan, répondit le bâtard avec délectation, votre serviteur et futur époux !
Le visage d’Ariane perdit de sa superbe.
  - Futur époux, s’indigna-t-elle, qu’est-ce que cela signifie !?
  - Votre père nous a chaleureusement donné sa bénédiction. Approchez que je vous
embrasse !
Il s’approcha d’elle en tendant les mains.
  - Ne me touchez pas ! S’exclama Ariane en reculant d’un pas.
  - Allons, allons !
Il l’attrapa, mais Ariane, en se débattant, lui fit perdre l’équilibre si bien qu’ils tombèrent
tous deux à la renverse. Un bruit sonore de tissu que l’on déchire résonna et ils se
retrouvèrent à terre, lui allongé sur elle. Ils se contemplèrent un moment en silence, yeux
dans les yeux.
  - Sale brute, vous avez déchiré ma robe !
Il se redressa pour contempler les dégâts, la mine contrite.
  - Navré, je ne souhaitais pas abîmer une si belle pièce.
Il accompagna ses paroles d’un regard plein de désir, annonçant qu’il ne parlait pas
uniquement de la robe, si bien que la jeune femme rougit.
- Si vous êtes plutôt convainquant physiquement, décréta Ariane en reniflant de dédain, il
va vous falloir revoir vos manières si vous souhaitez que je supporte un mari tel que vous.
  - Dois-je comprendre que vous m’épouserez ?
  - Ais-je le choix ? Répliqua-t-elle sèchement.
Il l’aida à se redresser et son chaperon accoura près d’elle pour l’aider à camoufler le
mauvais état de sa robe.
  - Je ne serais pas un piètre mari, affirma Jehan avec un sourire charmeur, vous ne
regretterez rien.
Ariane hocha la tête.
  - Je prie pour que vous disiez vrai ! Mais pour le moment, je suis simplement effrayée.
Elle s’éloigna alors, laissant à Jehan la joie de constater qu’il n’épouserait pas une femme
dénuée de caractère. Lui et Ariane feraient merveille ! Plusieurs semaines s’écoulèrent avant
le mariage et Jehan prit soin de se faire connaître de sa promise : l’accompagnant dans ses
promenades, s’asseyant à côté d’elle lors des repas et lui servant les meilleures pièces de
viande tout en lui comptant fleurette. Il s’acharnait à conquérir son coeur et la jeune femme
perdit bientôt toute peur, dévoilant elle aussi à son fiancé de nombreux traits de caractères
qui la rendait encore plus désirable à ses yeux. Ariane n’avait alors plus aucune crainte
d’épouser un simple bâtard et, le soir de la nuit de noce, c’est pratiquement en ronronnant
qu’elle se blottit contre son mari. Jehan avait donc un duché, une femme désirable et aimant
et, bientôt, il obtiendrait sa vengeance. Tout allait pour le mieux !

Coralie Martin

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